Comprendre l'Eau Partagée Généalogie du projet

Si l'on cherche à connaître la généalogie du projet de « l'Eau Partagée » et les différents ancrages qui ont contribué à nourrir sa vitalité il faut nous tourner vers l'événement majeur de son origine, sa source, suivi des trois temps forts et de leurs harmoniques, qui se sont succédés et enrichis pour en renouveler l'énergie dans sa complexité vivante.

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Du local au planétaireParallèlement à ces activités d’éducation, le syndicat des eaux s’était engagé aux côtés de plusieurs ONG dans des actions de coopération avec des villages sahéliens du Burkina Faso. Très vite l’intérêt d’ouvrir les activités éducatives à la découverte de cette région et de faire participer les élèves aux échanges de coopération est apparu évident à l’ensemble des partenaires. En effet, la découverte de l’eau dans une approche systémique de leur territoire permet aux participants de faire l’apprentissage des nécessaires solidarités locales (entre les communes) et régionales (avec l’eau des Alpes) pour corriger l’inégale répartition des ressources et permettre l’accès à l’eau de tous ses habitants. Ayant compris la nécessité de ces solidarités aux niveaux local et régional, ils sont alors en capacité de comprendre la nécessité de ces solidarités à l’échelle de la planète sur laquelle les ressources en eau sont aussi très inégalement réparties. Ainsi, l’immersion dans la réalité vivante de leur territoire et les échanges avec les villageois d’une région sahélienne menacée de désertification par manque d’eau, sont des leviers très puissants pour favoriser la transformation des représentations mentales de l’ensemble des participants. Car pour de nombreux élèves et adultes, l’eau se résume bien souvent à un robinet qu’il suffit d’ouvrir pour qu’il coule. En allant voir ce qui se passe derrière leur robinet, en suivant les cheminements superficiels et souterrains de l’eau, depuis les sources jusqu’à la mer, en découvrant les interactions permanentes entre l’eau, les minéraux, les végétaux, les animaux et les hommes, les participants peuvent mesurer les enjeux environnementaux, économiques et sociaux de la gestion de l’eau. Et au final comprendre l’importance de la respecter, la protéger et la partager.En découvrant les réalités de la vie quotidienne d’un village sahélien où le manque d’eau peut entrainer la mort de la végétation, des animaux et des hommes, ils se réapproprient une conscience oubliée de la valeur vitale de l’eau. Une pédagogie de la rupture qui va elle aussi agir sur les représentations mentales et permettre les changements de comportements. Éducation, coopération et développement durableLa gestion durable de l’eau et plus largement de nos ressources passe par des changements des comportements humains basés sur le respect, la solidarité et le partage. Parce qu’elle est le moyen privilégié de ces évolutions, l’éducation constitue l’outil de gestion d’avenir et durable des ressources de la planète. L’expérience de l’eau partagée a aussi permis de démontrer que pour être efficaces, ces actions d’éducation devaient être étroitement associées à des actions de coopération. Sur le territoire de la corniche des Maures, l’éducation a favorisé la participation de nom-breux élèves, de parents et d’autres acteurs du territoire aux actions de coopération. Elle a suscité un intérêt local pour les projets de solidarité internationale. Dans la région du Sahel, le processus éducatif (démarche chemin) introduit dans toutes les actions de coopération a permis aux populations locales de développer leurs capacités pour s’approprier et pour gérer durablement leurs projets.L’éducation sans coopération, c’est le développement de la seule compétition individuelle. La coopération sans éducation, c’est le risque de transferts de technologies  qui échouent parce qu’ils ne sont pas adaptés aux capacités et cultures locales. En 2004 faisant suite au colloque, parrainé par l'UNESCO, qui s'était tenu en 2003 à Cogolin à l'initiative du SIDECM, sur le thème «Pour une éthique de l'eau» et à la demande de nos amis bur-kinabés, une équipe pluri disciplinaire regroupant des partenaires du projet de l'eau partagée (Enseignants, hydrogéologue, hydrobiologiste, directeur du SIDECM, …) se rendait à Markoye au nord du Burkina Faso pour mettre à l'épreuve d'un milieu radicalement différent de celui de son élaboration et de sa mise en œuvre la, «démarche-chemin». Un transfert était-il possible?L’éducation à la santé communautaire au Burkina FasoL’amorce de la réflexion commune sur la thématique environnement/santé fait suite à quinze années de présence et d’actions du projet de l’Eau partagée porté par le SIDECM (syndicat de la corniche des Maures) sur le territoire de Markoye (commune située dans la région du Sahel, aux confins du Mali et du Niger, au Nord du Burkina Faso). Elle a été initiée concrètement dès mars 2004 autour d’un projet de santé «un collège propre dans un village propre», repris depuis no-vembre 2008 dans le cadre du PCD (plan communal de développement).Afin de prendre en compte les représentations mentales des différents acteurs et toutes les dimensions de leur personnalité, rationnelle, corporelle et imaginaire, les activités proposées mettent en œuvre une méthode originale, la «démarche chemin», qui permet, à partir d’une problématique donnée, de bien prendre en compte les contextes, ressources et contraintes locales. Le concept de démarche chemin a été forgé par Edgar Morin dans son essai Eduquer pour l’ère planétaire. Il en donne la définition suivante : «la méthode comporte deux niveaux qui s’articulent et se rétro alimentent : d’une part, elle favorise le développement de stratégies pour la connaissance et d’autre part elle favorise le développement de stratégies pour l’action». Il s’agit «d’un outil de pensée complexe qui ne propose pas dans son dialogue un programme, mais un chemin (méthode) au cours duquel on pourra mettre à l’épreuve certaines stratégies qui se révéleront fructueuses ou non pendant le chemin dialogique. En ce sens, la pensée complexe engendre sa propre stratégie, inséparable de la participation inventive de ceux qui la développent».Cette option méthodologique qui fonde l’originalité du projet «l’eau partagée» a fait la preuve de son efficacité non seulement sur le territoire français du Pays des Maures, mais également dans le contexte en totale rupture, géographique, culturelle et socio-économique, du village sahélien de Markoye, au nord est du Burkina Faso. C’est toutefois la création de l’association l’Eau partagée en juin 2009 qui donnera la possibilité à ce projet de prendre forme et d’amorcer sa mise en oeuvre sur un quartier pilote dès 2012.Pour en savoir plus, laissons Jeanine Riou,  présidente de l’association depuis septembre 2011, nous raconter la genèse de cette démarche visant à faire évoluer les comportements.